P 14 : Texte réponse Nouët Lettre conformité du moulin

 

NOUËT Jacques, Lettre écrite à une personne de condition sur la conformité des reproches et des calomnies que les jansénistes publient contre les Pères de la Compagnie de Jésus avec celles que le ministre Du Moulin a publiées devant eux contre l’Eglise Romaine dans son livre des Traditions, imprimé à Genève en l’année 1632

Lettre datée du 2 août 1656 (même date que la XIe Provinciale).

NOUËT Jacques, Lettre écrite à une personne de condition sur la conformité des reproches et des calomnies que les jansénistes publient contre les Pères de la Compagnie de Jésus avec celles que le ministre Du Moulin a publiées devant eux contre l’Eglise Romaine dans son livre des Traditions, imprimé à Genève en l’année 1632, slnd (juillet 1656), 12 p. in-4°.

Provinciales, éd. Cognet ; GEF V, p. 218; le texte est donné in Réponses..., éd. De 1658, p.67 sq. GEF V, p. 218, extraits. Sur l'accusation d'hérésie ou de complicité avec des hérétiques.

JOUSLIN Olivier, La campagne des Provinciales de Pascal, I, p. 3223 sq. L'édition fait preuve d'un certain luxe, puisqu'elle offre une véritable page de garde sur laquelle le titre est centré, et que le texte ne commence qu'en page 3. On connaît une version plus brève de ce texte, débarrassée de son récit-cadre où seules figurent les citations des Provinciales et de Du Moulin mises en parallèle, assorties de leur réflexion. On ne sait si c'est une version abrégée ou une version primitive. Le recueil des Réponses de 1657 donne l'auteur de cette lettre comme étant le même que celui de la Lettre écrite à une personne de condition sur le sujet de celles que les jansénistes publient. Mise en fiction des espionnages réciproques entre les deux camps : le narrateur dit avoir assisté à la lecture donnée de la neuvième lettre du "casuiste de Port-Royal" à Charenton. Le narrateur, après avoir entendu la lecture, et conçu des soupçons, va voir un jésuite de sa connaissance à qui il demande le livre de Du Moulin pour le comparer aux Provinciales. Comparaison des propositions sur deux colonnes. Le style pastiche celui des Provinciales. Reproches : les lieux d'accusation sont les mêmes, de même que les injures à l'Eglise catholique; le refus de la dévotion à la Vierge, et de la libéralité de Dieu dans la distribution de sa grâce. Les jansénistes ont étudié la doctrine des mœurs dans les livres des hérétiques.

Il insiste sur le fait que l'auteur des Provinciales n'est ni théologien ni docteur. Le fait qu'il se présente au début proche de Port-Royal, mais éloigné et neutre dans la huitième lettre ruine sa crédibilité. C’est une tentative de retourner contre l'adversaire sa propre stratégie : comment un auteur qui n'est pas théologien peut-il, après avoir refondu toute la théologie de la grâce en quelques lettres, entreprendre de réformer à lui seul la morale des jésuites ? Il s’agit de faire passer Pascal pour un railleur sans science. La manière d'écrire de Pascal, "pleine de rencontres ingénieuses", ne convient pas à un ecclésiastique. On connaît une version plus brève de ce texte, débarrassée de son récit-cadre où seules figurent les citations des Provinciales et de Du Moulin mises en parallèle, assorties de leur réflexion.

Le texte qui suit est celui du recueil des Réponses aux Provinciales.

Le texte soutient que l’on ne doit pas chercher qui est l'auteur des Provinciales : l’auteur des Provinciales avoue en tout cas ne pas être docteur. Par là il rend tout son art argumentatif inutile. Son style divers et brillant ne convient pas à un docteur ni à un prêtre ; son ton intéresse tout le monde, riches, valets, libertins, bons esprits. Pour le croire, il faudrait se méfier de tous les docteurs en place, d'où des abus et un désordre épouvantables.

 

Autre Lettre du même Auteur,

Sur la conformité des Reproches et des Calomnies que les Jansénistes publient contre les Pères de la Compagnie de Jésus : avec celles

Que le Ministre du Moulin a publiées devant eux contre l’Église Romaine, dans son livre des Traditions, imprimé à Genève en l’année 1632.

Monsieur,

Le Casuiste du Port-Royal n’a pas suivi mon avis : on commence à le connaitre : je crois qu’il ne s’était caché que pour se faire chercher, et qu’il est bien aise qu’on le trouve. Devinez, Monsieur, qui il est. Je l’appris ces jours passés à Charenton, où l’on vend ses Lettres Morales, qui sont reçues dans le Consistoire comme un second Évangile. Je fus assez heureux pour me rencontrer en un lieu, où la neuvième fut lue en bonne compagnie. C’était Monsieur N qui en faisait la lecture avec un plaisir incroyable de ces Hérétiques.

Il n’eut pas plutôt achevé de lire cette pièce, que je m’approchai de lui pour le saluer, car il est de ma connaissance, et après quelques civilités, je lui dis que je ne m’étonnais pas de voir entre ses mains les écrits des Jansénistes, puisqu’ayant été condamnés à Rome, ceux de son parti les devaient chérir désormais comme leurs Frères. À quoi il me répartit en souriant, qu’il serait à souhaiter que tous les Prêtres et les Docteurs Papistes écrivissent comme celui-là, que bientôt nous serions tous d’accord, et que la sainte union avec l’Église Romaine, se conclurait aussi facilement à Charenton, qu’elle avait été autrefois arrêtée avec la Luthérienne. Je vois bien, lui dis-je, que vous n’avez pas lu la huitième Lettre de ce grand homme pour qui vous avez tant d’estime, vous ne le prendriez pas, comme vous faites, pour un Prêtre ni pour un Docteur : et je m’assure que vous l’en aimeriez encore mieux. Je l’ai lue, me dit-il, et je sais bien qui en est l’Auteur, il est fort connu de nos Anciens. Je le priai de me le dire, et il vit bien qu’il avait piqué ma curiosité : mais il me répondit qu’il le savait en secret ; et qu’il ferait tort à l’Auteur de le déceler ; que ce n’était pas sans dessein qu’il ne voulait pas être connu de tout le monde ; et qu’il n’était pas encore temps de se déclarer. Néanmoins comme il vit que je n’étais pas fort satisfait de cette réponse, et que d’ailleurs si je désirais de le savoir, il n’avait pas moins envie de me l’apprendre ; il me tira un peu à l’écart, et me dit à l’oreille : C’est Monsieur du Moulin. Quoi, Monsieur, lui dis-je, du Moulin est-il ressuscité ? Depuis quand faites-vous des miracles de cette sorte ? Le mot de miracle le fit rire, puis me parlant sérieusement : tout de bon, me dit-il, c’est Monsieur du Moulin qui vit encore à l’heure que je vous parle. Je pensais, lui dis-je, qu’il était mort, et il me semble que la Gazette en a parlé. Il est vrai, me dit-il, mais la Gazette s’oublia de dire que les bons Écrivains ne meurent jamais. Et là-dessus il me montra le nom de ce Ministre à l’ouverture d’un Livre qui porte pour titre : Catalogue ou dénombrement des Traditions Romaines, imprimé à Genève en l’année 1632 où il m’apprit que du Moulin avait ramassé toute la Doctrine Morale des Papistes, et que comme il avait imité Calvin en ce dessein, il n’avait pas aussi manqué d’imitateurs qui l’avaient fidèlement suivi : qu’on vit paraître dix ans après le Livre de la Théologie Morale des Jésuites, dont l’Auteur n’a fait que retrancher les reproches qui choquent plus visiblement la créance de l’Église Romaine, et supprimer le nom des Docteurs qui ne sont pas Jésuites, pour faire croire qu’il n’en veut qu’à ceux-ci, et leur en attribuer tout le blâme : mais que l’Auteur de ces dernières Lettres a beaucoup enchéri sur celui-ci, et que s’il n’a pas, comme lui, gardé l’ordre de Monsieur du Moulin, il en a exprimé si naïvement l’esprit, qu’on jugerait, à le voir seulement une fois, que c’est lui.

Pendant qu’il me tenait ce discours, et qu’il était prêt de le vérifier, en conférant ces nouvelles Lettres avec l’ancien Catalogue des Traditions Romaines, le Ministre de Charenton survenant assez mal à propos rompit notre entretien, je fis le possible pour le renouer : mais quelque peine que je prisse, je ne le pus jamais faire ; si bien que je fus contraint de les quitter et de revenir à Paris, avec autant de regret d’avoir perdu l’occasion de me satisfaire, que de désir de la recouvrer.

Comme j’entrais dans la ville encore tout affligé de ma disgrâce, la pensée me vint d’aller aux Jésuites, où je connais un Religieux, que je fis appeler à l’heure même, et le priai d’abord de me montrer les Traditions du Ministre du Moulin. Étonné de cette demande : Je crois, Monsieur, me dit-il, que quelqu’un vous a révélé mon dessein, et toutefois je ne me souviens point de l’avoir dit à personne. De quel dessein, lui dis-je, me parlez-vous mon Père ? N’avez-vous point peut-être deviné le mien ? À ces paroles il me regarde quelque temps, et voyant que je demeurais dans le silence, il me demande si je ne voulais point voir la doctrine Morale des Jésuite ? C’est cela même, lui répondis-je, que je cherche. Certes, Monsieur, me dit-il, je ne sais comment je me suis avisé de conférer les décisions Morales que les Jansénistes nous attribuent par reproche, dans leurs Lettres, et dans leur Théologie Morale, avec celles que du Moulin a publiées dans ses Traditions, contre l’Église Romaine : mais je les ai trouvées si semblables, qu’en ôtant le nom d’Escobar, et mêlant ces noms illustres de Saint Thomas, de Saint Antonin, et de Navarre, je n’y ai remarqué presque aucune différence. J’en ai fait un recueil que je vous veux faire voir : vous en serez vous-même le juge. Mon Père, lui dis-je, je ne me contente pas de le voir si vous ne me permettez d’en tirer une copie : je la veux envoyer à un de mes amis qui vous en sera obligé aussi bien que moi. Je ne vous puis rien refuser, me dit-il, je vous laisse l’original même, j’avais projeté de le donner au public, mais vous en ferez ce qu’il vous plaira. C’est assez que le Livre me demeure.

Je me retirai fort satisfait de la civilité de ce Père, qui me promit en nous séparant qu’il me ferait voir dans quelque temps la réfutation de toutes ces impostures. Je vous envoie cependant cet Écrit, par où vous pourrez voir en quelle source les Jansénistes puisent leur Morale, et vous ne vous étonnerez plus qu’ils savent si bien railler et médire, puisqu’ils ont pour Maîtres Calvin, et du Moulin. Je suis etc.

 

La conformité des Reproches et des Calomnies que les Jansénistes publient contre les Jésuites, avec celles que du Moulin a publiées devant eux contre l’Église Romaine.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 350. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 2 pag. 1 et 2 Edit. de Col. p. 15.

Il y a deux sortes de grâces de Dieu, l’une qui donne le pouvoir, mais ne donne pas le faire, qui est la grâce suffisante. L’autre qui donne le pouvoir et le faire, qui est la grâce efficacieuse. Dont s’ensuit que la grâce suffisante n’est pas suffisante, puisqu’elle n’a pas assez d’efficace, et que la grâce de pouvoir sans la grâce de faire ne suffit pas. Bellarmin l. 2 de gratia c. 1 2 et 3.

Les nouveaux Thomistes sont d’accord avec les Jésuites, d’admettre une grâce suffisante donnée à tous les hommes. Mais ils veulent néanmoins que les hommes n’agissent jamais avec cette seule grâce, et qu’il faille, pour les faire agir, que Dieu donne une grâce efficace qui détermine réellement leur volonté à l’action, et laquelle Dieu ne donne pas à tous. De sorte que suivant cette doctrine, cette grâce est suffisante, sans l’être : car si elle suffit, il n’en faut pas davantage pour agir, et si elle ne suffit pas ; elle n’est pas suffisante.

Réflexion.

Ces reproches ne sont-ils pas tous semblables ? Le ruisseau ressemble-t-il mieux à sa source, et le fils au père, que le Janséniste au Calviniste ? Voilà néanmoins presque tout le sujet de la première et de la seconde Lettre.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 329. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 6 pag. 7 Edit. de Col. p. 90.
La servante d’une putain publique ne pèche point mortellement, quand elle ouvre la porte aux hommes, ou porte les billets, ou accoutre le lit, parce qu’en cela elle n’a autre but que de gagner sa vie. Navarre l. 5 Consil. de poenit et remiss. Cons. 5. Porter des billets et des présents, ouvrir les portes et les fenêtres, aider leur Maîtres à monter à la fenêtre, tenir l’échelle pendant qu’il monte, tout cela est permis et indifférent, (au regard des servantes et des valets qui ont des Maîtres débauchés) s’ils le font pour leur commodité temporelle. Bauny.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Pag. 327. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 7 pag. 2 Edit. de Col. pag. 98.
Pour sauver son honneur il est permis de tuer. Navarre Manual. c. 15 n. 4. Un homme de guerre peur sur l’heure poursuivre celui qui l’a blessé, non pas avec l’intention de rendre mal pour mal, mais avec celle de conserver son honneur. Reginald.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 327. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 7 pag. 5 Ed. de Col. p. 106.
Un gentilhomme doit plutôt tuer, que de fuir ou recevoir un coup de bâton. Navar. Man. c. 15 n. 4 Tolet. Inst. Sacer lib. 3 où il dit, que cette règle n’est que pour les personnes de qualité, et que tous tiennent cela communément. Il est permis selon le consentement de tous les Casuistes, ex sententia omnium, de tuer celui qui veut donner un soufflet, ou un coup de bâton, quand on ne le peut éviter autrement. Lessius.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom.Page 335. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 8 page 5 Edit. de Col. p. 125.
Une femme qui a reçu argent pour salaire de sa paillardise n’est pas obligée à restituer l’argent, parce que cette action n’est pas contre la justice. Thomas 2 .2 q. 32 n. 7 Antonin 2 p. tit. 2 c. 5. Les biens acquis par l’adultère, sont véritablement gagnés par une voie illégitime, mais néanmoins la possession est légitime. Lessius.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 337. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 8 page 5 Edit. de Col. 126.
Un faux témoin, qui a reçu de l’argent pour rendre faux témoignage n’est pas obligé à restituer. Tholet l. 5 c. 59 n. 6. Les biens acquis pour voies honteuses, comme par meurtres, une sentence injuste, etc sont possédés légitimement, et on n’est point obligé à restituer. Escobar.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 335. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 8 page 6 Edi de Col. p. 127.
Cette action (c’est-à-dire recevoir le salaire pour la paillardise) n’est pas contre la justice, non pas même quand elle aurait pris outre le juste prix. Thomas 2 .2 q. 32 Tolet. Navarre. Mais ils ont oublié de dire quel est le juste prix. Qu’on est obligé de payer différemment les actions de cette sorte, selon les différentes conditions des personnes qui les commettent, et que les unes valent plus que les autres. Filiucius.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 402. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 8 page 6 Edit. de Col. 128.
Les règlements touchant les interrogations que les Confesseurs doivent faire aux femmes, sont trop impudiques et abominables pour être ici insérées. Voyez le Pénitential Romain, le 19 Liv. du Décret de Buchard. Bénédicti. Sanchez. Il me fit coir des choses de cette nature si infâmes, que je n’oserais les rapporter, et dont il aurait eu horreur lui-même, etc.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 319. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Théol. Morale sect. 3 contre le Décalogue pro 1.

Vasquez Jésuite, soutient que toute créature peut être adorée en Dieu, voire jusqu’à un festu. Vasquez de Adorat l. 3 disp. 1 c. 2

Vasquez dit qu’on peut adorer non seulement les images, mais aussi toutes les créatures, mêmes inanimées, comme représentant Dieu. Vasq. l. 2 de Ador. disp. 1 c. 2.

Réflexion

Même reproche : même citation. L’Auteur des Lettres, voyant que ce reproche était frivole, a passé les mers pour trouver notre idolâtrie prétendue dans la Chine. Lettre 5 p. 2 édition de Col. p. 62. Mais le Père de Rhodes qui revint de ces Contrées il y a quelques années, en apporta des nouvelles bien contraires, et plus certaines que celles de ce Calomniateur.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 341 et 342. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Théol. Mor. sect. 3 contre les Command. de Dieu

Dieu ès deux Tables de la Loi ne commande ni la Foi, ni la Charité. Thomas 2. 2 q. 10 a. 4 Navarrus Manualis c. 11 ff. 5.

Ils ont passé jusques à ce point d’impiété, de soutenir ouvertement, que l’acte intérieur d’amour de Dieu, n’était que conseillé, et non point commandé. P. Sirmond de la défense de la ver. tra. 11 p. 9 et p. 12.

 

Réflexion

Je ne parle point ici de la conformité de la doctrine du P. Antoine Sirmond avec celle de saint Thomas, il me suffit de montrer celles des Calvinistes et des Jansénistes. L’Auteur des Lettres nous reproche bien dans la cinquième, que les vertus Chrétiennes sont inconnues parmi nous, dépourvues de la charité : mais il n’a pas encore cité le P. Sirmond ; il y a de l’apparence, qu’ayant si exactement transcrit la Théologie Morale, il ne s’oubliera pas de ce reproche.

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 343. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 5 page 4 Edit. de Col. 64.
Le jeune n’est pas violé pour boire du vin, ni pour manger quelque chose après avoir bu, de peur que le breuvage ne nuise à l’estomac. Emm. Sa v. Jejunium. L’on peut sans rompre le jeune, boire du vin, et en grande quantité, ç telle heure qu’on voudra, et même de l’hypocras. Escobar.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 405. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 5 page 5 Edit.de Col. 66.
Les Prêtres peuvent absoudre celui qui pour juste cause et raisonnable ne veut pas laisser passer l’occasion de pécher. Emm. Sa ver. Absolutio n. 12. On ne doit refuser l’absolution à ceux qui demeurent dans les occasions prochaines du péché, s’ils sont en tel état qu’ils ne puissent les quitter, sans donner sujet au monde de parler, ou sans qu’ils en reçussent eux-mêmes de l’incommodité. Bauny.

Réflexion

 

Du Moulin traduit mal les paroles d’Emm. Sa. Le Janséniste interprète mal la pensée du P. Bauny : mais ils conviennent tous deux dans le même dessein, et leur reproche est le même. Voici les paroles d’Emm. Sa, que du Moulin a mal traduites, Adsolvi potest qui ex probalili causâ non vult omittere peccandi occasionem, modo proponat firmiter non peccare, etc ver absol. n. 13. Il fallait dire, qui pour juste et raisonnable cause ne veut pas quitter l’occasion de pécher.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 312. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 6 page 4 Edit de Col. p. 84.

Le Pape a droit de prendre argent pour les Indulgences, absolutions, dispenses, parce qu’il tire cet argent non par forme de salaire, mais pour entretenir la grandeur et la dignité de sa charge. Tolet inst. Sacerd. l. 5 c. 89 n. 3.

Si l’on donne un bien temporel pour un spirituel, et qu’on donne l’argent pour le prix du bénéfice ; c’est une simonie visible : mais si on le donne, comme le motif, qui porte la volonté du bénéficier à le résigner, ce n’est point simonie. Valentia Tannerus.

Réflexion

Ces deux cas sont différents, mais le reproche est semblable ; car du Moulin prétend reprocher une simonie palliée par la direction d’intention, et le Janséniste aussi.

 

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 334. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 8 page 4 Edit. de Col. p. 122.
Un homme qui a ravi ou soustrait le bien d’autrui, n’est pas obligé à le restituer, quand il ne le peut faire qu’avec son déshonneur. Navarre Cons. l. 3 de stat. mon. cons. 3. Celui qui fait banqueroute peut en sureté de conscience, retenir de ses biens autant qu’il est nécessaire pour faire subsister sa famille avec honneur, ne indecorè vivat Lessius.
Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 342. Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 8 page 4 Edit. de Col. p. 122.


 

 

 


 

 

On peut donner conseil à un homme qui veut pécher, de faire un moindre péché. Navarre l. 3 consil. de voto, cons. 36 n. 2.

 

 

 

 

Quand on voit un voleur résolu, et prêt à voler une personne pauvre, on peut, pour l’en détourner, lui assigner quelque personne plus riche en particulier, pour le voler au lieu de l’autre. Vasq.

 

Réflexion

Le Ministre propose le cas en général, et le Janséniste l’applique et le détermine au particulier, mais c’est toujours le même reproche, et il est honteux à cet écrivain médisant, de ne s’être pas contenté d’imiter le dessein général, et l’invention d’un Calviniste, pour nous calomnier, mais de l’avoir suivi pas à pas, et presqu’en tous les chefs de ses accusations, de ses reproches.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 335.
 

 

Il est loisible à un pauvre de dérober secrètement un riche, qui est obligé à l’assister. Emm. Sa ver. Furtum. n. 1.
 

Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 8 page 5 Edit. de Col. p. 124.

 

Qu’il est permis de dérober non seulement dans une extrême nécessité, mais encore dans une nécessité grave quoique non extrême.

Réflexion.

Emmanuel Sa cité par du Moulin parle ainsi : Excusari à peccato furtum ob magnam necessicatatem probabiliter quidam dicunt, alii ob solam extremam volunt, idque modo rei dominus non sit in eadem necessitate. Augustinus ob nullam excusat. Ego cum illis sentio, qui à divite qui tenetur pauperi subvenire, aiunt licere ad eam rem clàm accipere. ita Ang. Medina. Navarr. Le Janséniste a pris la première partie, le Calviniste la seconde ; mais c’est toujours à même dessein.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 337.
 

 

Vouloir commettre un vol, ou un meurtre, ou un adultère, n’est pas péché mortel, pourvu que la délibération ne soit pas pleine et entière. Tolet de Inst. Sacerd. l. 4 c. 2.


 

Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettres 4 page 2 Edit. de Col. p. 42.

 

Pour pécher et se rendre coupable devant Dieu, il faut savoir, que la chose qu’on veut faire ne vaut rien, ou au moins en douter, craindre, ou bien juger que Dieu ne prend plaisir à action à laquelle on s’occupe, qu’il la défend, et nonobstant la faire, franchir le saut, et passer outre. P. Bauny Somme p. 306.

Réflexion

Les savants ne peuvent douter que ces reproches ne soient semblables, puisqu’afin que la délibération sur une action mauvaise soit pleine et entière, il faut savoir que la chose ne vaut rien, ou pour le moins en douter, craindre, ou bien juger que Dieu ne prend plaisir à l’action et néanmoins la faire, etc. Voilà le sujet de la quatrième Lettre. On fera voir ailleurs leurs injustice de ce reproche, et de tous les autres ensemble : mon dessein n’est que de faire voir la conformité des Jansénistes avec les Calvinistes dans leurs accusations, soit fausses, ou injustes et frivoles.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 336.
 

 

Celui n’est pas menteur qui supplée en son esprit quelque addition mentale, sans laquelle il mentirait. Navarr. l. 5 Consil. de crim. fals. Consil. 1.

Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 9 page 4 Edit de Col. p. 145.

 

Il est permis d’user de termes ambigus, en les faisant entendre en un autre sens qu’on ne les entend soi-même. Sanchez.
 

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 336.

 

Un criminel interrogé en Justice s’il a fait un tel acte, peut répondre je ne l’ai pas fait, combien qu’il l’ait fait, pourvu qu’il sous-entende en sa pensée, je ne l’ai point fait en la prison. Navarre l. 2 Consil. de Jura. Cons. 4.

Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Lettre 9 page 5 Edit. de Col. p. 145.

 

On peut jurer qu’on n’a pas fait une chose, quoiqu’on l’ait faite effectivement, ou entendant en soi-même qu’on ne l’a pas faite un certain jour, ou avant qu’on fut né, ou en sous-entendant quelque autre circonstance pareille. Sanchez.

 

Reproche de du Moulin contre l’Église Rom. Page 323.

 

Jurer par le corps de Dieu, et par le Sang Dieu, n’est pas un blasphème. Navarre Manual. cap. 12 n. 85.


 

Reproche des Jansénistes contre les Jésuites. Théologie Morale sect. 3 prop. 5.

 

Ils veulent que ces paroles de jurements et de blasphèmes ordinaires, Mort, Tête, Ventre, etc pourvu qu’elles ne soient prononcées que par colère, et non par indignation contre Dieu, ne sont pas des blasphèmes. Bauny.

 

 

Conclusion.

Outre la conformité de toutes ces reproches particulières, on peut encore faire trois observations considérables. La première, que l’ordre et la disposition générale du libelle de la Théologie Morale est toute semblable à celle que du Moulin a gardé dans son Catalogue des Traditions Romaines, et qu’il ne fait que suivre les traces de ce ministre parcourant avec lui les Commandements de Dieu, les Sacrements, et ce qui regarde la Monarchie Ecclésiastique, afin de trouver occasion de calomnier la Morale des Jésuites, comme le Calviniste fait celle de l’Église.

La seconde, qu’il y a plusieurs autres chefs d’accusations injurieuses dans lesquels les Jansénistes conviennent avec ce même Ministre, tels que sont la dévotion vers la Vierge, dont il se raille avec impiété : la contrition, la facilité du salut, et la libéralité de Dieu à répandre ses grâces sur tous les hommes : si bien que l’on peut dire qu’il n’y a presque rien dans leurs Lettres, qui ne soit dans le libelle de la Théologie Morale, ni dans la Théologie Morale, qui ne se trouve dans le Catalogue des Traditions Romaines.

Enfin, qu’il ne faut pas s’étonner si les disciples de Jansénius ont étudié la doctrine des mœurs dans les écrits des Hérétiques, puisque leur Maître y avait appris celle de la Grâce ; mais qu’il est étrange de voir que leurs ouvrages qui ne sont que des restes infâmes d’un Ministre railleur, et ennemi déclaré de l’Église, aient un aussi grand cours parmi les Catholiques que nous le voyons aujourd’hui ; et que ceux qui les lisent se laissent persuader que l’innocence est criminelle, parce qu’elle est calomniée, ou qu’ils peuvent la condamner sur le rapport des Hérétiques, parce qu’ils n’ont pas assez de patience pour attendre qu’elle se soit justifiée.